Théâtre de l'opprimé·e

De quoi parle-t-on?

Le théâtre de l’opprimé·e, à l’origine créé par le dramaturge brésilien Augusto Boal dans les années soixante et qui a évolué au fil des lieux et du temps, a pour principe de passer par l’espace fictionnel du théâtre pour agir ensuite concrètement et s’émanciper de situations de domination. De par son caractère fictif et scénique, le théâtre peut être le lieu de réflexions collectives, d’exploration des problèmes et de leurs solutions. Ce qui caractérise le théâtre de l’opprimé·e est l’utilisation de moyens d’expressions qui passent avant tout par le corps et par un langage non verbal: c'est ce qu'on appelle le théâtre-image. Outrepassant ainsi les barrières de l’oralité ou de la langue, il est particulièrement accessible à toute personne.

La pratique du théâtre de l’opprimé·e est constituée de divers jeux. Ces jeux (par exemple le mime, la caricature) permettent au participant·es de se rencontrer, de partager du vécu et de l’entraide. C’est là une manière d’amener les conditions favorables pour libérer la parole, afin d’exprimer des vécus intimes, personnels, en toute confiance et en confidentialité au sein du groupe.

Cet outil prend également la forme de représentations publiques participatives, appelées des théâtre-forum. Technique qui est sans doute la plus popularisée aujourd'hui, le théâtre-forum prend la forme sur une intervention directe des spectateurices lors de ses représentations.

Le mouvement

Historiquement, ce fut à l’occasion d’une représentation en dramaturgie simultanée, c’est-à-dire une pièce où les spectateurices pouvaient proposer des alternatives de jeu aux acteurices, que serait né le théâtre-forum. Ces derniers et dernières, qui improvisaient donc la proposition sur le moment, n'ont un jour pas compris ce que leur disait une spectatrice : elle a donc fini par monter sur scène pour le faire elle-même !

Augusto Boal systématise ce principe et le nomme théâtre-forum. Après une courte mise en situation par les comédienn·es, le public est invité à proposer une modification ou une suite possible à l’histoire, pour tenter de trouver une solution au problème présenté. La pièce est alors rejouée, intégrant les suggestions et modifiant l’action des personnages, mais surtout en substituant un·e des acteurices par lae spect’acteurice qui veut s’exprimer. Le joker, sorte de maître du jeu, anime alors la deuxième partie de la représentation.

Les pratiques divergent selon les compagnies. De mon point de vue, il est important que la personne du public monte sur scène en occupant une place qu'elle pourrait avoir dans la société. Si notre objectif est de chercher ensemble des pistes d'action face à des oppressions structurelles, il est important que chacun·e parle de sa place, ou sinon les dés sont truqués dès le départ!

Le théâtre-forum

On trouve également dans la famille du théâtre de l'opprimé·e d'autres formes dont nous n'avons pas parlé ici, comme le théâtre-invisible ou les techniques introspectives. Les usages et méthodes varient selon les personnes qui s'en emparent, et reste que ces pratiques sont de puissants outils d'émancipation et de recherche collective sur nos sociétés!

Et c'est pas tout!

Et voici une vidéo d'un théâtre-forum réalisé avec la compagnie qui pétille où je tiens le rôle de joker. Ce type de pièce est pertinent pour à la fois s'entraîner à réagir dans une situation de déséquilibre des forces (où sous-tendent souvent des inégalités structurelles), de partager des réflexions en collectif sur la grande échelle et expérimenter des pistes d'action!